Présenté comme un grand rendez-vous de la jeunesse tchadienne, le 5ᵉ congrès du Conseil National de la Jeunesse du Tchad (CNJT), tenu à Abéché, a suscité autant d’enthousiasme que de controverses. Si l’événement se voulait festif et rassembleur, la présence remarquée de drapeaux du parti au pouvoir a semé le doute sur la neutralité d’une instance censée représenter toute la jeunesse tchadienne, sans distinction d’opinions ni d’idéologies.
Une neutralité mise à l’épreuve
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Créé pour représenter la jeunesse tchadienne dans toute sa diversité, le CNJT se devait d’être un espace de neutralité et d’ouverture. Or, en laissant s’afficher les symboles partisans, l’organisation envoie un signal contradictoire. Peut-on encore parler d’union et de vivre-ensemble lorsque la scène d’un congrès de jeunesse devient le miroir d’une appartenance politique ?
Ce glissement, apparemment anodin, mine la confiance et fragilise le peu de crédibilité dont jouissait encore cette institution auprès de la jeunesse.
Entre représentation et récupération
La présence du ministre de la Jeunesse et des Sports, bien qu’institutionnelle, a contribué à brouiller les perceptions. Ce qui devait être une simple participation protocolaire a pris des allures de récupération politique.
Sous couvert d’un discours sur la paix et la cohabitation, l’événement a laissé transparaître un message implicite : celui d’une jeunesse convoquée pour applaudir plutôt que pour s’exprimer.
À force de vouloir tout encadrer, le pouvoir transforme le CNJT en relais plutôt qu’en porte-voix. Une dérive qui affaiblit l’autonomie d’un organe déjà fragilisé par les critiques internes.
Le drapeau comme fracture
Le drapeau du Mouvement Patriotique du Salut (MPS), ce n’est qu’un symbole. Mais dans ce contexte, c’est aussi une prise de position. Sa présence dans une assise nationale du CNJT marque une frontière invisible entre “ceux du bon camp” et les autres. Et cette frontière, au lieu de rassembler, divise.
L’espace du CNJT devrait être celui de tous les jeunes Tchadiens, indépendamment de leurs sensibilités. Y introduire un emblème politique, c’est trahir l’esprit d’ouverture qui devrait l’animer. Si le CNJT cède à la tentation partisane, il ne devient plus le Conseil de la jeunesse tchadienne, mais celui d’un seul camp. Et cela, c’est tout le contraire de l’esprit du vivre-ensemble qu’il prétend défendre.
HIGDE NDOUBA Martin


