Dans un pays où la corruption a souvent ses intouchables, la saisie spectaculaire des biens de l’ancien trésorier d’Abéché, Mahamat Massar Houd, relance le débat sur la sincérité de la lutte contre les détournements publics. Coup d’éclat judiciaire ou simple diversion politique ?
La justice tchadienne semble vouloir prouver qu’elle n’a pas totalement abdiqué face à la corruption endémique. Cette fois, c’est Mahamat Massar Houd, ancien trésorier provincial d’Abéché, qui se retrouve au centre du filet. Inculpé pour détournement présumé de 6 milliards de FCFA, il voit désormais ses biens confisqués par la justice.
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Les ordonnances du doyen des juges d’instruction ont conduit à la saisie de 31 villas et 2 jardins, estimés à plus de 3 milliards FCFA. Pour beaucoup, l’affaire Mahamat Massar Houd illustre à quel point la gestion des fonds publics est devenue un sport national : chacun prend sa part, en silence, jusqu’à ce qu’un exemple soit choisi pour la vitrine.
Dans les rues d’Abéché comme à N’Djamena, le nom de Mahamat Massar Houd revient avec ironie. Certains saluent une opération coup de poing, d’autres dénoncent une mise en scène bien orchestrée. Car si Mahamat Massar Houd est aujourd’hui montré du doigt, combien d’autres continuent de piller sans être inquiétés ? La population, lasse des scandales, observe cette affaire avec scepticisme : le “petit poisson” a mordu à l’hameçon, mais les “requins” nagent encore.
Pour les observateurs, l’ancien trésorier provincial n’est qu’un maillon d’une longue chaîne. Ses villas et jardins saisis rappellent l’ampleur des détournements silencieux qui gangrènent le pays. Pourtant, si la justice veut redorer son blason, elle devra aller au-delà de l’affaire Mahamat Massar Houd et s’attaquer aux véritables architectes du système.
Car derrière M.Massar Houd, se cache toute une génération de gestionnaires publics qui ont confondu la caisse de l’État avec un compte personnel. Les Tchadiens, eux, attendent encore le jour où la lutte contre la corruption cessera d’être sélective, où chaque Mahamat Massar Houd aura à rendre des comptes, du plus petit percepteur au plus grand dignitaire.
Pour l’heure, Mahamat Massar Houd demeure le symbole d’un système malade, où le petit poisson finit souvent dans le filet.
HIGDE NDOUBA Martin


